Résumé
J’avais littéralement organisé ma rencontre avec Jean Lambert. Dès que j’ai connu cet homme, je me mettais à redouter sa mort. N’avait-il pas tenté de m’en prévenir : « Choisir un ami si vieux ». En son absence, l’idée de sa disparition me revenait ; déjà vivant il me manquait. La nuit nous écoutions des javas jusqu’à ce que la peur se dissipe. Nous avons en tout cas bien ri devant la caméra toute seule, bêtement en train de nous filmer. Peut-être que la solitude était la chose que nous avions à partager, risiblement. Pierre Creton
L'avis de Tënk
Filmer les personnes aimées est la matière et l’origine du cinéma de Pierre Creton. Dans ce court film, second d’une immense œuvre à venir, le cinéaste documente sa relation avec un ami disparu, Jean Lambert, dont chaque apparition à l’écran ressuscite un peu plus la chaleur d’un lien unique et précieux.
Dès les premières images, Creton noue ce lien avec l’acte de filmer même : le portrait de cette amitié est ici indissociable du geste de création. Avec la complicité du protagoniste, l’action devient alors un habile prétexte pour énoncer pudiquement le désir du cinéaste : suspendre le temps et partager ce présent intime et inachevé, avant la disparition.
Après avoir semé, l’art du cinéaste récolte méticuleusement des fragments de vie insolites, dont l’émotion, parfois désarmante, traverse durablement l’écran.
Terence Chotard
Cinéaste