Résumé
Composé de fragments qui se renvoient les uns aux autres et se télescopent créant ainsi de multiples jeux de temporalité et de spatialité, ce film traite sur une durée de trois ans (2007-2010), de la situation des personnes migrantes à Calais. Et par là même, des politiques engagées par les États policiers modernes, qui débordent le cadre de loi et font surgir des zones grises, des interstices, des espaces d’indistinctions entre l’exception et la règle. Un découpage conceptuel, un “partage du sensible” se révèle : l’individu (et aux premiers chefs, mais pas uniquement, comme énonciation des “vaincus”, parias ou plèbe contemporaine : le réfugié, le déplacé, l’immigré, le sans-papier, le chômeur, le drogué, le jeune de banlieue… ), traité comme un criminel, se voit “dénudé”, dépouillé, privé des droits les plus élémentaires qui font de lui un sujet de droit, est réduit à l’état de “corps pur” ou “vie nue”. Biopolitique majeure.
L'avis de Tënk
Pamphlet poétique et avant-gardiste sur les politiques migratoires européennes, et les mobilisations sociales contre elles, le film de Sylvain George suit l’Histoire en cours telle qu’elle se déroule pendant trois ans dans les camps de migrants à Calais, à la fin des années 2000. Prenant le pouls d’une démocratie mise à mal par un État policier raciste, l’auteur travaille un noir et blanc qui renvoie à l’importance d’archiver les événements contemporains, tout en construisant des métaphores visuelles au plus près des témoignages des personnes filmées : les noirs profonds de l’invisibilisation, les blancs brûlants de la violence « légitime » de l’État…
Contrepoint cinématographique à la superficialité et au sensationnalisme de la couverture médiatique sur la « jungle de Calais », Qu’ils reposent en révolte est un cri insurrectionnel contre l’oppression et une invitation à rejoindre le combat de ces « figures de guerres ».
Charlotte Selb
Programmatrice et critique
