Résumé
Comment reconstruire la figure d’une grand-mère que l’on n’a pas connue quand son souvenir est scellé par un tabou familial depuis sa mort en 1946. Entre les « on dit » et les non-dits, se tisse un récit choral et, peu à peu, l’histoire de Germaine s’éclaire, à travers les souvenirs de ses enfants. De nouvelles interrogations font surface et nous renvoient à l’histoire des femmes de son époque.
L'avis de Tënk
Dans Le carnet russe, Claire Latxague entreprend de déchiffrer l’agenda de 1966 de sa mère. Peut-être lui apprendra-t-il quelque chose sur cette femme qu’elle n’a que peu connue? Seul problème : il est en russe, une langue que Claire ne parle pas.
Avec le bien nommé Germaine ou la retenue – parce que le récit fait preuve d’une belle sobriété –, elle poursuit la quête de ses origines et ses réflexions sur la transmission. Cette fois, elle s’interroge sur la trajectoire de sa grand-mère paternelle, emportée par le tétanos en 1946. La grande famille que Germaine a laissée derrière compose alors une polyphonie qui permet à la réalisatrice de recoller lentement les parcelles d’information que la famille s’est transmises – et de trouver celles qu’on a préféré taire. Elles sont éparses, parce que « parler de Germaine, ça voulait dire parler de choses tristes. Donc on évitait d’en parler. »
En prenant comme point de départ une femme qui a vécu « 72 mois de grossesses », ce documentaire d’enquête marie finement narrations personnelles, « cinéma direct », témoignages et entrevues.
Il trace aussi, en filigrane, une histoire commune aux femmes de cette génération, quel que soit le pays qui les a vues naître.
Jenny Cartwright
Documentariste et artiste audio