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29 min
Canada, 1987

Production : ONF / NFB
Français, Anglais
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Les films d'Alanis Obomsawin



Résumé


Située tout près d’Edmonton, la Maison Poundmaker est un centre de désintoxication et de santé mentale pour Autochtones. Créée en 1973 et encore ouverte aujourd’hui, elle offre des programmes et services administrés par des Autochtones et fondés sur des techniques de guérison culturellement adaptées. Ouvrant le court métrage sur les mots du grand chef cri des Plaines Pîhtokahanapiwiyin (Poundmaker), Alanis Obomsawin examine franchement les causes profondes des toxicomanies dans les communautés autochtones, expliquant que l’absence d’amour et de soutien – exacerbée par les effets du colonialisme et du racisme – sont à l’origine d’un problème d’alcoolisme qui se reproduit de génération en génération chez certains. Dans les témoignages émouvants et désarmants de résidents de la Maison Poundmaker, le film illustre le courage, la persévérance et l’espoir pour les générations à venir.

L'avis de Tënk


En quelques 29 minutes, Alanis Obomsawin réussit à aborder avec sensibilité, franchise et intelligence la vaste question du rapport à l’alcool des communautés autochtones. Donnant la parole à des résident.e.s plongé.e.s dans le programme de désintoxication de la Maison Poundmaker, elle dévoile l’étendue des souffrances auxquels ils et elles cherchent à échapper en s’intoxicant. Chacun des récit dévoilé nécessiterait son propre film tant les situations sont complexes; colonialisme, acculturation, cycle de reproduction des violences, rejets, abus… Alors que les pensionnats sévissaient encore (le film date de 1987 et le dernier pensionnat canadien a fermé ses portes en 1996), les individus qu’on voit à l’écran sont étonnamment lucides face aux causes de leur détresse. Les conséquences plus que désastreuses du colonialisme sont palpables; comment vivre quand on a été arraché à sa famille, forcé d’oublier sa langue, convaincu d’être un être à civiliser? Comment penser que les plaies d’autant de violence seront pansées en quelques générations?

 

Pourtant, à la Maison Poundmaker, une structure d’accueil et de soin se met en place, alternative, différente, adaptée, enfin. On y parle et on s’y fait écouter. On retrouve ou découvre cette chose absolument fondamentale à tout être humain; l’amour. Cette chose si évidente et gratuite, cette chose qui irradie et grandit dès qu’on s’en sert, cette nourriture du cœur qui permet la survie et l’avancement, a été saccagée par le colonialisme. Des parents rejettent leurs enfants qui leur rappellent trop leurs oppresseurs, les Blancs. Des enfants survivent aux suicides de leurs parents, découvrent leurs pères morts, leurs mères assassinées, leurs frères et soeurs meurtris. Des enfants sont utilisés comme bétail dans les fermes des Blancs, dans leurs « familles d’accueil ». Le monde devient parfois si laid qu’on en meurt, qu’on se pend après un arbre un après-midi.

 

La Maison Poundmaker existait en 1987. Elle existe toujours. Comment se fait-il que de tels lieux ne soient pas la norme? Comment se fait-il que les autochtones soient outrageusement surreprésentés dans les prisons au Canada, quand les plaies de l’acculturation sont toujours vives, qu’on découvre des tombes d’enfants anonymes? Alors que les violences subsistent envers les communautés autochtones, que le poids du passé continue d’hanter les jeunes en formation, qui tentent de définir leur identité, comment se fait-il que le retour aux pratiques ancestrales dans les prises en charge des détresses psychiques ne soient pas plus fréquent? Autant ce film rassure car il amène une réelle perspective de guérison, autant il désespère car il nous force à voir à quel point, 40 ans plus tard, les choses n’ont pas vraiment changé.

 

 

Naomie Décarie-Daigneault
Directrice artistique de Tënk

 

 

 

 

 

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