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26 jours
7 min
États-Unis, 2020

Production : Justin McHugh
Anglais
Français, Anglais

L'Amérique sensible



Résumé


One Nation Under est une enquête sur ce que signifie être Américain·e, remettant en question les notions idylliques de liberté et de pouvoir en observant les structures qui nous entourent et en écoutant les personnes qui s’y trouvent éclipsées.

L'avis de Tënk


One Nation Under propose de réexaminer le fameux — et controversé — serment d’allégeance au drapeau des États-Unis par le biais d’un vox pop repensé. Présenté en première au Festival Slamdance en 2020, en plein milieu du règne chaotique de Donald Trump à la Maison-Blanche, alors que le monde entier ne voyait pas encore une pandémie se profiler à l’horizon, ce court métrage de Justin McHugh présente ses intervenant·e·s en les filmant en plongée, la tête et le regard tournés vers le ciel — ou plutôt, comme le montage nous le suggère, vers l’immédiatement identifiable Stars and Stripes flottant sur les toits de gratte-ciels, on l’imagine, avoisinants. Pourtant, à l’écran, ces individus, tous issus de ce qu’on appelle des minorités visibles, de communautés culturelles différentes, restent cois, et leurs visages, plutôt d’humeur égale. C’est à la bande sonore de révéler leur témoignage, en voix hors champ, alors que chacun d’entre eux parle de son existence en terre états-unienne. L’écart est abyssal et préoccupant entre leurs expériences personnelles, qui passent de l’émigrée nouvellement arrivée pleine d’appréhension mêlée d’espoir à la fierté de l’homme ordinaire convaincu du gage de liberté prétendument garantie par le rêve américain.

Le titre du film revient continuellement à l’esprit à l’écoute de ces personnes. « One nation under God, indivisible, with liberty and justice for all » (« Une nation unie sous l’autorité de Dieu, indivisible, avec la liberté et la justice pour tous. »). Il devient clair très rapidement pourquoi le cinéaste a choisi de couper son titre au mot « under », cette omission permettant à la fois de cacher la partie si polémique du serment écrit en 1892 (la mention de Dieu datant seulement de 1954!) et d’attirer indéniablement l’attention sur ce qui a été volontairement dissimulé. Les intervenant·e·s du film semblent tout petit·e·s devant ce drapeau si lointain, si dominant — si hypocrite, même, à la lumière du serment masqué dans le titre. Les images de tous ces immeubles en hauteur, filmés dans des angles qui les tiennent bien serrés les uns contre les autres, créent une impression de resserrement et d’étouffement par accumulation, bien que les individus gardent une expression relativement neutre. Si ce drapeau est bien visible pour tous ces êtres humains ordinaires, comment ce drapeau — ou plutôt l’État qu’il représente — les voit-il, eux, trop souvent occultés par tant de politiques, tous partis confondus, du haut de ses nombreux piédestaux urbains?

 

 

Claire Valade
Critique et programmatrice

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