Résumé
Ce film est un hommage à Delphine Seyrig et à sa fascination pour le livre Calamity Jane’s Letters to her Daughter. Ces lettres, qui sont les lettres d’une mère à sa fille absente, sont devenues à la fin des années 1970 un emblème du féminisme. Delphine Seyrig avait projeté de réaliser un film sur Calamity Jane pour révéler toute la sensibilité de ce personnage qui transparaissait dans ses lettres, celles que sa fille ne recevrait pas car jamais envoyées. Seyrig voulait rendre public le regard de cette femme sur le monde. La lecture de cette correspondance ouvre la voie à une réflexion personnelle sur le féminisme et sur la relation mère-fille. Il s’agit également d’un hommage à la créativité féminine, ainsi qu’une forme d’engagement pour continuer à partager les histoires des femmes. Construit sous forme de chaîne, le film de Babette Mangolte est un hommage multiple: d’elle à Seyrig, de Seyrig à Calamity Jane, puis même de Calamity Jane à sa propre fille.
L'avis de Tënk
Calamity Jane : une personnalité mythique des États-Unis du 19e siècle érigée en modèle féministe. L’image d’une femme libérée qui enchaîne les emplois, monte à cheval, fume des cigares et menace de tirer si on ne la sert pas dans les tavernes réservées aux hommes. Bien que beaucoup d’histoires à son sujet ressemblent à des légendes, ce qui importe, c’est l’idée que les femmes se font de ce modèle et les destinées qu’elle a inspirées. Ayant vécu pendant la Conquête de l’Ouest, elle reste une figure coloniale et tout au long du film, on repère les traces d’un rapport problématique aux autochtones. Ne serait-ce que les figurines caricaturales d’un western saloon.
Prenant assise dans les mythes entourant Calamity Jane, le film est tout autant sur Delphine Seyrig, une actrice et réalisatrice féministe qui était d’avis que « le bonheur, c’est l’indépendance. » C’est donc sans grande surprise qu’elle partage cette fascination pour Calamity. Le film s’intéresse à la quête de Seyrig, à son monologue intérieur que la cinéaste Babette Mangolte crée à travers des images d’elle en réflexion : au café, dans sa voiture, à la fenêtre d’un hôtel, images filmées dans les années 1980 : « C'est là que Delphine trouve la voie à suivre. Ne pas abandonner, c'est ce dont le film devait parler, car c'était la plus grande force de Delphine. » Après le décès de Seyrig, Mangolte reprend la balle au bond et donne vie à sa quête.
Gabrielle Ouimet
Directrice artistique de Tënk
Pour en apprendre davantage sur Delphine Seyrig, féministe altière, nous vous invitons à consulter quelques archives par ici. À noter que dans cet entretien précis, le terme « racisme » est utilisé dans un sens qu'on ne lui connaît plus: pour parler de la discrimination envers les femmes.