Avec Ta peau si lisse, Denis Côté explore le territoire du corps ; celui que l’on façonne et que l’on sculpte pour le donner à voir, pour l’exhiber comme une sorte d’offrande aux yeux des autres. En suivant ces hommes forts dans leur intimité, sans fard, il fabrique une ode magnifique à ces corps musculaires et surdimensionnés. À travers une observation épurée, toute en sensualité et teintée d’humour, se révèle une sensibilité désarmante. Ils sont là, devant nous, s’offrant à une caméra patiente et posée, loin des stéréotypes de brutes que leur corps de colosses laisse imaginer. Leur travail de transformation, constant, minutieux, douloureux, se matérialise et se déploie dans chaque geste, chaque visage crispé et chaque sacrifice quotidien. Ainsi, la beauté finit par émerger autrement. Non pas dans le sourire forcé, ni dans la luisance des courbes ou la peau tendue à son maximum, mais lorsqu’ils sont tous ensemble, dans cet éden en pleine nature, demi-dieux, fragiles et puissants, avec cette peau pour seul recouvrement. Et si leurs rêves de podiums où se récoltent les fruits d’efforts surhumains, semblent parfois inatteignables, il s’avère que cette épreuve n’est peut-être qu’une excuse pour prendre soin de soi, et des autres. Denis Côté nous offre ainsi une œuvre généreuse, pleine de respect et de tendresse pour ces géants qui fascinent depuis la nuit des temps.

Nadine Gomez
Cinéaste