Entre bars et roulottes, l’amitié de Kim et Billy, forains, se tisse au cœur d’une masculinité joyeuse et rugueuse, faite de rires, de complicité, d’excès. Un monde d’hommes où l’on joue au bras de fer tout en se risquant à de discrètes confidences. Cet été-là, quelque chose vacille et Kim rêve d’un ailleurs. 

L’artifice s’inscrit dans une approche de cinéma direct. Tourné en deux temps, le projet a dû se réinventer lors du second bloc. Le renvoi de Billy, ami proche et personnage secondaire, a fait basculer l’équilibre initial. C’est ainsi qu’une nouvelle ligne narrative s’imposa, aiguillée par la vie elle-même. La caméra, observatrice, suit Kim dans ses gestes quotidiens : il joue, blague, doute, recoud délicatement une peluche, prend soin des machines foraines, de ses clients, et surtout, il déploie un univers plus secret, voire inattendu.

En effet, Kim collectionne les roches. Tel un enfant émerveillé par ses trouvailles, il y projette une valeur intime. « C’est la valeur que tu lui donnes qui est importante », nous dit-il. Le montage épouse cette tension intérieure — entre force et douceur, entre la fête et le retrait — pour dessiner le portrait nuancé de cet homme qui ne cesse de surprendre le spectateur. 

Savoir renoncer, abandonner, est un geste exigeant. Le montage c’est aussi l’art de choisir ce qu’il faut laisser partir. La réalisatrice et sa monteuse Anouk Deschênes ont fait le choix de couper certaines scènes explicatives, notamment un souvenir d’enfance sombre, assez spectaculaire, qui donnait une clef sur la personnalité de Kim, mais brisait la cohérence émotionnelle du film. C’est aussi ce choix qui nous permet cette proximité avec Kim : être avec lui, sans avoir besoin d’expliquer. 

Dans l’une des très belles scènes du film, sur une plage à la tombée du jour, le tout baignant dans une lumière bleutée, Kim, une lampe à la main, cherche tel un aventurier ses pierres si précieuses. Il devient, le temps d’un instant, le héros discret de son propre monde. Un monde à l’écart, fait de détails, de silence, de poésie. 

Emma Bertin
Monteuse

Présenté en collaboration avec